Chapitre 11, partie III
Le lendemain, Charles alla s’asseoir sur le banc, dans la tonnelle. Des jours passaient par le treillis ; les feuilles de vigne dessinaient leurs ombres sur le sable, le jasmin embaumait, le ciel était bleu, des cantharides bourdonnaient autour des lis en fleur, et Charles suffoquait comme un adolescent sous les vagues effluves amoureuses qui gonflaient son cœur chagrin.
À sept heures, la petite Berthe, qui ne l’avait pas vu de tout l’après-midi, vint le chercher pour dîner.
Il avait la tête renversée contre le mur, les yeux clos, la bouche ouverte, et tenait dans ses mains une longue mèche de cheveux noirs.
— Papa, viens donc ! dit-elle.
Et, croyant qu’il voulait jouer, elle le poussa doucement. Il tomba par terre. Il était mort.
Trente-six heures après, sur la demande de l’apothicaire, M. Canivet accourut. Il l’ouvrit et ne trouva rien.
Quand tout fut vendu, il resta douze francs soixante et quinze centimes qui servirent à payer le voyage de Mlle Bovary chez sa grand-mère. La bonne femme mourut dans l’année même ; le père Rouault étant paralysé, ce fut une tante qui s’en chargea. Elle est pauvre et l’envoie, pour gagner sa vie, dans une filature de coton.
Depuis la mort de Bovary, trois médecins se sont succédé à Yonville sans pouvoir y réussir, tant M. Homais les a tout de suite battus en brèche. Il fait une clientèle d’enfer ; l’autorité le ménage et l’opinion publique le protège.
Il vient de recevoir la croix d’honneur.
FIN